Une voie nécessaire et périlleuse

Le Livre Rouge nous confronte à la crise que traverse Jung au début des années 1910, crise profonde dont ressort une intuition fondamentale, celle de la nécessité vitale de ce qu’il nommera « individuation », à savoir l’intégration du Divin en soi, et sa reconnaissance par la présence de ce qu’il appelle le Soi. Rien de moins que « l’antique et intemporelle voie initiatique ». Mais c’est « une porte étroite » qui y mène, Jung le dit, elle « ouvre sur un étroit sentier, d’abord anodin et facile à embrasser du regard – étroit et à peine marqué parce que bien peu seulement l’ont suivi – mais qui mène au secret de la métamorphose et du renouveau. »

Le sujet du présent colloque nous incite à lire le Liber Novus en nous demandant en quoi les textes composant Le Livre Rouge concourent à formuler l’idée centrale de la psychologie et de l’anthropologie de Jung, celle de l’individuation, conçue et développée par Jung dans les années 1912 à 1928 où ses réflexions sont consacrées aux échanges entre le moi et l’inconscient.

L’être individué se détermine en fonction d’une éthique « nouvelle » parce qu’en rupture avec toute morale prescriptive et avec les normes collectives.

L’idée d’un « devenir soi » s’inscrit dans une longue histoire au départ de la mystique d’un maître Eckhart.

Dans les étapes historiques de la formulation d’un modèle de l’individuation, l’idée d’une conjonction des opposés comme métaphore de sa réalisation est souvent présente comme elle le sera dans les shémas développés par Jung.